Du croisillon à l’usage du hashtag

Utilisé depuis de nombreuses années sous d’autres noms et dans différents contextes, le hashtag a été popularisé pour lier un contenu à un mot-clé. Mais revenons un peu en arrière pour comprendre l’origine de ce petit symbole, initialement appelé croisillon.

 

Qu’est-ce qu’un croisillon ?

« Traverse d’une croix », nous dit laconiquement le Larousse, « bras d’une croix » trouve-t-on plus prosaïquement, « traverse qui partage un châssis de fenêtre » ou « partie de transept de part et d’autre de la nef ». Le croisillon, simple élément architectural ? Vous n’y êtes pas. Le croisillon, c’est ce que nous appelons de manière incorrecte la « touche dièse ». Non, non, pas la touche noire du piano qui zèbre le clavier et hausse la note d’un demi-ton. Non, celle dont on vous dit « pour être mis en relation avec le service facturation, tapez dièse ».

Eh bien ce dièse-là, n’est pas un dièse : c’est un croisillon. Et c’est une belle erreur de typo-traduction.

 

Une erreur de traduction

Le croisillon est un signe typographique apparu en France avec l’introduction des premiers claviers. C’est un signe qui nous vient des pays anglo-saxons, où il désigne un « pound »… un nombre. Eh oui, car en anglais, on dit aussi bien « you’re number 1 » que « you’re #1 ». Lorsque les Français ont vu ce symbole sur les premiers claviers, ils l’ont pris pour un dièse car les deux symboles se ressemblent étrangement. Mais alors qu’un croisillon s’écrit ”#”, un dièse s’écrit ”♯” (notez la subtile différence qui nous a tous induits en erreur). Mais cela fait tout de même une petite différence, source de l’erreur de dénomination…

Soulignons ici que rien de tout cela ne se serait produit si les claviers avaient été correctement localisés !

La localisation est l’adaptation d’une traduction aux conventions locales, en particulier en ce qui concerne les unités de mesure, symboles, monnaies… Il aurait donc fallu inscrire sur les touches le symbole « n° » et non un croisillon, ce qui aurait permis de réserver le mot dièse uniquement aux musiciens.

Les Belges et les Québécois, eux, ont bien compris la nuance entre le croisillon et le dièse, puisqu’en français belge et en français québécois on parle de… (petit) carré. Pragmatique et tout simplement… descriptif.

 

Du croisillon au hashtag…

Le croisillon est utilisé depuis des décennies en tant que symbole en programmation informatique. Il sert par exemple à définir des directives de compilation en  langage C et C++ ou des protocoles de communication IRC (Internet Relay Chat), ancêtres des messageries instantanées. Il était alors déjà appelé « hash » en anglais et désignait bien le dièse qui permettait de catégoriser des images, des messages, et autres contenus dans des groupes. Le croisillon a donc échappé à l’unique usage des claviers pour s’inviter dans d’autres secteurs.

Il devient le fameux « hashtag » popularisé par Twitter et aujourd’hui largement connu comme un marqueur lié à l’Internet.

C’est Chris Messina, utilisateur actif des réseaux IRC et ardent défenseur du logiciel libre, qui l’évoque pour la 1ère fois dans un tweet le 23 août 2007. Il y questionne  la pertinence de l’utilisation d’un croisillon devant un mot pour regrouper les tweets selon leur sujet et contexte. C’est finalement Nate Ridder, un habitant de San Diego, qui l’utilisera précisément pour cette fonction en communiquant sur les incendies qui sévissent cet été là : #sandiegofire. L’idée du hashtag, en tant que marqueur de contenu sur un sujet donné, venait d’être adoptée.

Quant à la paternité du mot, c’est Stowe Boyd, informaticien de la Silicon Valley, qui lui crédite le nom de « hashtag  : hash : croisillon + tag : marqueur, étiquette.

Il faudra néanmoins attendre juillet 2009 pour que Twitter l’intègre formellement sous forme de lien hypertexte.

 

La « hashtag mania »

Le hashtag est désormais largement utilisé  sur les réseaux sociaux, permettant de cibler un sujet, une tendance, une actualité, une marque… Savoir correctement l’utiliser permet de renforcer sa visibilité et celle de ses contenus. Il faut s’assurer en amont que notre hashtag fait l’objet d’un minimum de recherches mensuelles et d’en vérifier la portée selon le réseau social sur lequel on pense publier. Twitter ne fonctionne pas comme Facebook et Instagram par exemple.

Il faut également que les hashtags retenus soient faciles à épeler. Si les internautes font des fautes en les écrivant, ils ne trouveront jamais les publications visées.

Il convient par ailleurs d’être cohérents. Une liste de hashtags ne doit pas ressembler à un fourre-tout.  Si Instagram donne la possibilité d’intégrer jusqu’à 30 hashtags, il faut se raisonner et penser en termes de pertinence et de cohérence. L’idée qu’un grand nombre de hashtags permettrait de rassembler une audience importante et capable d’interagir avec vous est une fausse bonne idée. On ne qualifie pas bien en brassant large. Vous risquez de vous faire spammer et d’attirer des personnes cherchant simplement à ce que vous les suiviez en retour.

Certains abusent de l’usage du hashtag, recourent à des mots incompréhensibles, trop longs, composés parfois de mots collés les uns aux autres. Cette « hashtag mania » fait que parfois, la pratique déraille. On voit parfois, à ce titre, des listes de hashtags qui dépassent la longueur des posts eux-mêmes !

En résumé, voici quelques règles de base à retenir :

  • Ne pas utiliser de hashtag trop long. Le hashtag doit être court, intuitif pour que les gens puissent y penser et le retrouver facilement.
  • Ne pas utiliser de hashtag mystérieux ou énigmatique, à moins de l’envisager comme un code d’accès pour commenter un sujet bien spécifique.
  • Eviter les majuscules (sauf s’il s’agit d’un acronyme). Les majuscules donnent l’impression de crier. Elles demandent par ailleurs davantage d’effort de la part des utilisateurs pour saisir le hashtag.
  • Ne pas utiliser un trop grand nombre d’hashtags : 2 ou 3 hashtags bien qualifiés suffisent.

 

Depuis son origine à l’usage qui en est fait aujourd’hui, le fameux croisillon est parvenu à devenir un élément incontournable de toute publication sur les réseaux sociaux. Icône à la fois populaire et déjà presque ringarde lorsqu’elle est citée à l’oral, le hashtag sert aussi à fédérer des causes. Le « Hashtag Activism » englobe en effet des formes de militantisme qui se tiennent sur les réseaux sociaux. On se souvient notamment de : #OccupyWallStreet, #BlackLivesMatter ou #MeToo.

Quel qu’en soit le dessein, commercial ou militant, il semble qu’on ne l’arrêtera pas de si tôt.

 

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