« Nothing sucks like an Electrolux. » Cette traduction bien connue, maladroite vu le double sens du verbe « sucks » (aspirer/craindre), montre bien comment un faux pas d’ordre linguistique peut se transformer en un cauchemar coûteux en termes d’image de marque.
S’il est vrai que la traduction IA comme la traduction humaine ont déjà provoqué des catastrophes dans le monde du marketing, les enjeux n’ont jamais été aussi importants pour les entreprises qui évoluent au sein de notre marché mondial hyperconnecté.
L’intelligence artificielle et la traduction automatique progressent rapidement, mais certaines nuances culturelles, expressions idiomatiques et notions contextuelles continuent de leur échapper.
Depuis des années, les spécialistes en localisation avisés jouent les héros de l’ombre, rattrapant des catastrophes en devenir bien avant qu’elles ne soient repérées par le public. C’est grâce à eux que nombre d’erreurs dignes de figurer dans les « perles » des traductions ratées ont pu être évitées.
Des « testiculations » aux inculpations : notre sélection d’anecdotes sur les « erreurs en devenir » de traduction par IA
Elemar de Souza Cruz, Content Localisation & Community Manager britannique-brésilienne, nous donne un exemple frappant des limites de la traduction par IA. Elle a remarqué :
« En traduisant du matériel pédagogique contenant des dialogues entre enfants, j’ai remarqué que l’IA transformait les prénoms des enfants en mots anglais aléatoires, traduisant même Hareem par « here » (ici). Cela montre à quel point les nuances culturelles peuvent se perdre dans la traduction. »
Ce cas souligne à quel point les nuances culturelles et le sens peuvent être facilement déformés lorsque le contexte et la sensibilité appropriés ne sont pas pris en compte dans la traduction.
Chloe Barton (cheffe de projet en localisation, Version internationale) a compilé une liste de vraies erreurs rattrapées de justesse par des professionnels de la localisation (Version Internationale et Stoquart).
Ces exemples témoignent de la vigilance et des compétences nécessaires pour faire en sorte que le message d’une marque sonne juste et trouve un écho sur divers marchés internationaux :
- Nous faisions une traduction pour une entreprise spécialisée dans les bases de données. L’IA a généré une phrase vraiment très drôle : elle a rendu « handle unforeseen testexpression values » (littéralement : gérer les valeurs d’expression de test imprévues) par « gérer les valeurs de testiculation imprévues » !
- Dans le cadre d’un projet de formation technique, la traduction automatique a complètement halluciné. L’anglais disait : « the customer will receive the check in four to six weeks » (le client recevra le chèque dans un délai de quatre à six semaines), et la traduction était « le client recevra le chèque dans un lait de quatre à six semaines ».
- Dans les conditions générales relatives à l’achat d’un abonnement après une période d’essai, la phrase « Am I going to be charged after the trial? » (Vais-je être facturé après l’essai ?) a été traduite en français par : « Serai-je inculpé après le procès ? ».
- « Niggles are often warning signs of injury » → « Les nigauds sont souvent des signes avant-coureurs d’une blessure », alors que « niggles » fait référence à une douleur légère.
- « A niggle is a pain that is subtle, and may cause slight but persistent annoyance. » Cette fois-ci, le terme « niggle » a été traduit par « couteau » : « Un couteau peut engendrer une peine subtile mais persistante ».
- « Make sure to drink little and often to prevent bloating or stitches » → « Veillez à boire peu mais régulièrement afin d’éviter les ballonnements ou les points de suture », alors qu’ici, « stitches » veut dire « points de côté ».
Les linguistes ont post-édité ces phrases et corrigé les erreurs, puis les ont signalées au client.
Pour aller plus loin :
IA, post-édition ou traduction humaine ? Découvrez les meilleures stratégies de localisation pour les SaaS en 2025.
13 erreurs de traduction IA (et humaine) bien connues
Erreurs de traduction humaine
- KFC (Chine) : le slogan « Finger‑lickin’ good » a été traduit par « Mangez vos doigts » (吃掉你的手指), et a dû être corrigé très vite.
- Pepsi (Chine) : « Come alive with the Pepsi Generation » a été traduit par « Pepsi ramène vos ancêtres d’entre les morts », ce que les Chinois ont considéré comme une offense.
- Slogan mondial d’HSBC : l’expression « Assume nothing » (ne rien laisser au hasard) a été traduite par « Ne rien faire », ce qui a nui à la communication de la marque. Par ailleurs, corriger cette erreur de traduction lui a coûté 10 millions de dollars.
- Clairol et son fer à boucler : il s’appelait « Mist stick », mais en allemand, « mist » signifie fumier… Le stick à fumier a fait un flop sur les marchés germanophones.
- Ford Pinto (Brésil) : « Pinto » signifie « pénis » en argot brésilien. Ford a été victime de nombreuses moqueries et a dû changer le nom de ce modèle.
- Audi e-tron (France) : même si « étron » signifie « matière fécale » en français, la marque a évité une catastrophe en fournissant du contexte et grâce à la qualité de son modèle.
Erreurs de traduction automatique
- KFC (Amérique latine) : une IA a traduit la phrase « Grill with confidence » en « Asa con confianza », ce qui est correct grammaticalement, mais ressemble plus à un ordre qu’à une accroche marketing. « Disfruta de la parrilla con confianza » serait une tournure plus naturelle.
- Mercedes‑Benz, « Experience the Drive » : l’IA a traduit la phrase par « Erleben Sie die Fahrt », ce qui, encore une fois, est correct, mais très plat. Un traducteur humain aurait pu partir sur « Freude am Fahren erleben » pour rendre le ton de la marque.
- Une intégration logicielle « sans couture » : la phrase « seamless integration » a été traduite par « intégration sans couture » par l’IA, ce qui n’a aucun sens. On parle plutôt d’« intégration fluide » ou « harmonieuse ».
- Powerade en japonais : l’IA a traduit le nom de la gamme « Power water » par « Chikara Mizu » (eau percutante), ce qui fait davantage penser à une agression qu’à un boost d’énergie.
- Ford et sa pub en arabe : l’expression « high-quality body » (châssis de haute qualité) a été traduite en arabe par « جثة عالية الجودة » (ce qui signifie « cadavre de haute qualité »), une erreur de traduction cauchemardesque. Un traducteur humain qualifié aurait utilisé « هيكل » au lieu de « جثة ».
- La traduction automatique de Facebook : en Israël, un homme a été arrêté, puis relâché, après avoir publié un message sur Facebook, « Bonjour » en arabe, qui avait été traduit en anglais et en hébreu par « Attaquez-les » (cet exemple dramatique montre bien que l’IA ne parvient pas à tenir compte du contexte).
- Ray Dalio et les sous-titres de son discours : des phrases comme « How arrogant! How could I be so arrogant? » (Comment ai-je pu être aussi arrogant ?) ont donné des traductions qui n’avaient aucun sens (Comment ? Aragon…) en raison d’erreurs de reconnaissance vocale et d’un manque de compréhension du contexte.
La traduction IA et ses erreurs : limites de l’algorithme et manque de nuance
L’intelligence artificielle, malgré ses évolutions rapides, comporte d’importantes limites de par sa nature algorithmique, et a souvent du mal à saisir la complexité et les subtilités inhérentes au langage humain.
Ces limites transparaissent de différentes manières, et impactent notamment les traductions nécessitant une connaissance approfondie de la culture cible et du contexte.
La traduction littérale est l’un des principaux défauts de l’IA : les systèmes traduisent les textes mot à mot sans tenir compte des nuances culturelles ou contextuelles. Par exemple, la phrase « Tu me manques » peut devenir « You are missing me », ce qui veut dire tout l’inverse.
Autre exemple plus sérieux : l’expression allemande « Kinderärztliche Versorgung » (couverture pédiatrique) a été mal traduite par « the food supply in paediatricians » (l’approvisionnement alimentaire des pédiatres), ce qui montre bien que l’IA ne tient aucunement compte du contexte.
L’IA a aussi bien du mal avec les ambiguïtés, par exemple avec les homonymes et les termes polysémiques. Sans contexte précis, les outils d’IA peuvent mal interpréter des termes comme « banc », et parler d’un siège plutôt que d’un banc de sable.
Le langage figuré, y compris les expressions idiomatiques et les métaphores, complique encore davantage la tâche de l’IA. Des expressions telles que « donner sa langue au chat » ou « passer l’arme à gauche » n’ont aucun sens si elles sont traduites de façon littérale, ce qui témoigne d’un important déficit de compréhension.
Erreurs linguistiques dues à l’algorithme
L’IA continue de faire des erreurs de langue pures, en particulier lorsqu’elle est confrontée à des structures grammaticales complexes :
- Erreurs morphologiques : mauvaise interprétation des structures grammaticales, par exemple, verbes au passé en arabe rendus au présent continu dans la langue cible.
- Erreurs sémantiques : mauvais choix de mots, ce qui a un impact significatif sur le sens. Par exemple, le mot arabe الفريق (major général) rendu par « équipe ».
- Erreurs lexicales : erreurs causées par un choix de mot incorrect ou par l’omission/ajout de mots, ce qui altère fortement le sens de la phrase.
- Erreurs syntaxiques : les mots ou expressions ne sont pas dans l’ordre. La traduction est grammaticalement incorrecte ou n’a pas de sens.
- Fautes d’orthographe : erreurs d’orthographe, de ponctuation et d’emploi des majuscules, y compris correction non autorisée du texte source.
Non-prise en compte des références culturelles et ton inadapté
L’IA est intrinsèquement incapable de gérer les nuances culturelles complexes, ce qui fait que ses traductions peuvent être inadaptées, inappropriées ou très plates. Le contenu IA a souvent du mal à faire jaillir l’émotion nécessaire pour que le marketing soit efficace et que l’image de marque résonne positivement.
L’IA a également du mal avec les termes spécialisés, notamment dans le domaine médical et dans celui des technologies, où la précision est pourtant de rigueur. Les langues qui comptent peu de ressources disponibles et de nombreuses variations dialectales constituent aussi un défi, car les données d’entraînement sont limitées. Par ailleurs, les outils d’IA peinent à assurer la cohérence terminologique, stylistique et de ton dans les documents longs.
Limites intrinsèques des réseaux neuronaux
Les caractéristiques fondamentales des systèmes de traduction automatique neuronale (TAN) favorisent les erreurs de traduction :
- Sensibilité extrême : de légères variations dans le texte source peuvent générer des résultats très différents.
- Biais humains : l’IA peut hériter de biais présents dans les données d’entraînement, reproduisant et amplifiant les inégalités dans la société.
- Raisonnement obscur (effet « boîte noire ») : il est parfois difficile de diagnostiquer les erreurs en raison d’un manque de transparence concernant la façon dont les traductions sont générées.
- Incertitude inhérente : l’IA fonctionne par probabilité. Des traductions hautement probables peuvent être incorrectes, ce qui est très problématique pour certaines applications essentielles.
- Précision mathématique discutable : l’IA a du mal avec la traduction de nombres précis et de certains calculs.
Faire appel à des experts en localisation permet d’éviter ces écueils
Les spécialistes en localisation et leurs équipes sont les mieux placés pour prévenir ces erreurs. Voici pourquoi :
- Avec la post-édition par des experts natifs, qui retravaillent le contenu généré par la machine, les expressions idiomatiques, le ton et les références culturelles sont préservés.
- L’assurance qualité et la révision itérative (plusieurs phases de relecture et de vérification en contexte avec des locuteurs natifs) permettent de repérer les erreurs avant que le texte ne soit publié.
- Grâce à l’analyse du marché cible et aux vérifications d’ordre culturel (réflexion sur le nom des produits, groupes de discussion, consultations avec des partenaires locaux), il est possible d’éviter les connotations indésirables dans les traductions (par exemple, Mist stick, Pinto, Audi e‑tron).
- La prise en compte du contexte (à rebours de la traduction littérale) permet d’ajuster le contenu : les expressions idiomatiques sont traduites correctement, le contenu suscite le même niveau d’engagement que la source et le ton employé est adapté (voir l’exemple « Grill with Confidence » plus haut).
- Grâce à l’application de bonnes pratiques en matière de localisation logicielle, l’UI et les images sont adaptées, et les dates/nombres sont correctement formatés : l’interface utilisateur est conviviale (et pas juste traduite).
- Les success stories d’entreprises comme Netflix, Airbnb, Nike, McDonald’s, Adobe, etc., constituent autant d’exemples de stratégies de localisation qui ont permis de renforcer le lien de confiance avec l’utilisateur et qui ont trouvé leur écho auprès de divers publics grâce à l’adaptation culturelle et à une communication de marque inclusive.
Résumé
Section | Points clés |
Erreurs de traduction humaine | Exemples notoires avec des marques très connues, comme KFC, Pepsi, HSBC : des fiascos marketing avec des conséquences dans le monde réel, en raison de traductions littérales ou inadaptées culturellement |
Erreurs de traduction IA | Erreurs récentes faites par des outils automatiques qui ne tiennent pas compte du contexte, des expressions ou des normes culturelles, parfois avec des conséquences sérieuses |
Bonnes pratiques en matière de localisation | Les spécialistes de la localisation empêchent la survenue de ces erreurs grâce à leur réseau de linguistes natifs, avec des contrôles qualité, en tenant compte des normes culturelles et du contexte, et en menant des tests sur le marché cible |
Conclusion: l’expertise humaine demeure indispensable pour les marques internationales
Les outils de traduction par IA sont des solutions rapides et efficaces, mais l’œil humain a toujours sa place, en particulier pour ce qui est de la traduction de slogans ou d’accroches très importants pour une marque. Les entreprises B2C qui ont une stratégie de localisation efficace savent qu’il faut trouver le juste équilibre entre la technologie et l’humain pour faire passer leur message auprès de publics internationaux.
Trouvez la solution adaptée à votre marque !
Faites en sorte que vos accroches et slogans résonnent à l’international.
Échangez avec des experts en localisation qui savent comment trouver l’équilibre entre l’efficacité de l’IA et la précision de l’humain.